construire - (a)ménager - réhabiliter - transformer - scénographier
MÉNAGER POUR DURER
Prendre soin des lieux, des ressources et des liens pour construire la ville de demain

La durabilité n’est pas un slogan ni une simple addition de labels techniques. C’est un concept large qui dépasse les cases à cocher : il s’agit avant tout de qualité. Une qualité qui se ressent et se vit : le confort d’un lieu, ses ambiances, la force de son identité, son inscription dans un paysage et la qualité des matériaux qui le composent. Elle inclut l’esthétique, le bien‑être, le relationnel et l’histoire du site : autant de dimensions qui nourrissent le lien social et font de la ville durable un support de vie, pas seulement un décor.
Construire pour durer, c’est se projeter dans le temps long, penser l’usage et le ressenti plutôt que la quantité. C’est retrouver un bon sens parfois oublié : bâtir solidement, comprendre le lieu, anticiper les besoins futurs. Ménager, au sens de Thierry Paquot, c’est prendre soin : des lieux, des ressources, mais aussi des liens humains.
Le contexte et le bon sens comme fondations
Un projet durable commence par une lecture fine du Genius Loci : comprendre l’esprit du lieu, son histoire et ses usages pour en révéler la singularité. Cette analyse évite les interventions déconnectées et valorise ce qui fait déjà sens dans le paysage et la culture locale.
Ce bon sens se traduit par des choix adaptés : s’appuyer sur l’existant, réutiliser quand c’est possible, concevoir des bâtiments adaptables. L’objectif : créer des formes intemporelles, hospitalières pour les générations présentes et à venir.
Sobriété et innovation : un équilibre à inventer
Construire durablement ne consiste pas à choisir entre high‑tech et low‑tech, mais à trouver un équilibre. Les technologies peuvent être utiles lorsqu’elles apportent une réelle valeur ajoutée, mais elles ne remplacent pas le bon sens constructif.
Nous privilégions un « soft‑tech » : utiliser la technologie uniquement lorsqu’elle est utile et proportionnée. Cela signifie :
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privilégier des solutions simples, robustes et peu consommatrices,
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utiliser la technologie de façon ciblée pour améliorer le confort et l’adaptabilité,
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rester attentif au coût global pour éviter les systèmes trop complexes.
Une façade bien orientée, une isolation performante, des protections solaires adaptées et une conception bioclimatique qui exploite les ressources naturelles valent souvent mieux qu’une accumulation d’innovations fragiles. Revisiter des savoir‑faire anciens - matériaux locaux, techniques traditionnelles, dispositifs passifs - peut aussi devenir un levier d’innovation. À titre d’exemple, l’Atelier HOZE est formé aux règles professionnelles de construction en paille, une technique ancestrale réhabilitée pour ses qualités thermiques et écologiques.
Une exigence et une responsabilité collectives
La durabilité impose un haut niveau d’exigence : expérimenter, dépasser les acquis, accompagner les entreprises vers des techniques nouvelles, tester et ajuster. Elle invite à élargir - parfois à réinventer - nos compétences et à créer un cadre où chacun peut progresser.
Cette exigence doit aussi s’inscrire dans un projet politique : réunir les acteurs publics et privés autour d’une ambition qui réhumanise les rapports sociaux et la ville. Un tel projet, en renforçant les sentiments, les émotions et l’utilité sociale, a un effet d’entraînement sur l’ensemble de la société : il favorise des dynamiques positives qui rejaillissent sur d’autres domaines comme l’aménagement, la reconstruction, la culture ou l’économie locale.
C’est une responsabilité partagée : maîtres d’ouvrage, collectivités, bureaux d’études, architectes, entreprises et usagers. Chaque décision - du choix des matériaux à l’organisation du chantier - a un impact sur le temps long. C’est ainsi que l’on construit des projets capables de durer, de s’adapter et de transmettre un héritage vivant aux générations futures.
« L’avant-garde, quand elle est consciente, ne se tourne jamais vers le futur, mais tente un extrême effort de renouer avec le passé. » - Giorgio Agamben